Depuis plusieurs semaines, «le chef de file [québécois, on présume] de vente au détail de vêtements pour enfants» tient un concours sur Facebook pour trouver la plus belle chambre d’enfants. Un exemple qui démontre bien que Facebook n’est pas une plateforme de concours.
Une plateforme relativement évoluée qui offre un grand bassin d’utilisateurs, c’est parfait pour organiser un concours, non? Oui. Sauf qu’on a aussi besoin d’outils de contrôle et d’analyse pour organiser un concours. Et ces outils-là ne sont malheureusement pas disponibles sur Facebook – qui, d’ailleurs, n’autorise pas qu’on ajoute des «règlements» à une page, ce qui est pourtant nécessaire pour tenir au Québec un concours dont le prix a une valeur de plus de 100$.
Pendant La Foire aux Meubles, un concours qui visait à trouver «le meuble le plus laid du Québec» et dont j’ai assumé une bonne part de l’animation, j’ai remarqué le concours de chambres d’enfants, qui faisait différemment.
Alors qu’on comptait sur une plateforme indépendante pour recueillir nos participations et nos votes, le concours de chambres pour enfants compte uniquement sur Facebook: les participations sont acheminées par courriel, puis publiées sur la page Facebook de l’entreprise: pour voter, les participants doivent «aimer» la photo.
Le hic, comme je l’expliquais plus haut, c’est que non seulement Facebook ne permet pas qu’on ajoute des règlements à une page, mais il n’offre pas les outils de contrôle requis. Examinons la présentation du concours de chambres d’enfants en détail, en portant une attention particulière aux outils offerts par Facebook:
«Les 3 ‘fans’ [de l’entreprise] ayant reçu le plus de votes pour leur photo gagneront…» Malheureusement, Facebook ne permet pas d’afficher la compilation du nombre de «likes» sur l’ensemble des photos d’un album -ou pire, de plusieurs albums. On présume donc que l’administrateur devra comptabiliser les votes photo par photo.
«Le concours prend fin le 31 juillet à 23h59.» Le hic, c’est que l’administrateur ne pourra pas mettre fin au concours le 31 juillet à 23h59. Bien qu’il pourra cesser de publier les nouvelles participations, il ne pourra pas désactiver la fonctionnalité de vote à moins de supprimer l’album – ce qui l’empêcherait de faire sa compilation. Ainsi, tant qu’il n’aura pas terminé de compiler les votes, on pourra toujours voter.
«Le prix de participation sera remis au hasard parmi toutes les personnes ayant voté.» Malheureusement, Facebook ne permet pas d’extraire «la liste de toutes les personnes distinctes ayant aimé une ou plusieurs photos». On a donc deux alternatives: photo par photo, noter les noms des gens qui ont «aimé», puis supprimer les doublons: un travail de moine difficile à réaliser étant donné qu’il sera toujours possible de voter pendant la période de compilation. L’autre alternative est de choisir trois chiffres au hasard: la première correspondra au numéro de l’album, la deuxième à la position de la photo et le troisième à la position du vote qui remporte. La première alternative prend un temps fou et n’est pas précise et la deuxième est injuste, puisqu’on augmente nos chances de gagner en votant pour plusieurs photos.
«Le concours est ouvert aux résidents du Canada âgés de 18 ans et plus.» Pour y arriver, il faudrait restreindre l’accès à la page aux résidents du Canada âgés de 18 ans et plus, ce que Facebook permet de faire. Le hic, c’est que certains fans de l’entreprise ne sont pas du Canada – et votent, donc sont éligibles et diminuent les chances des autres participants.
D’ailleurs, puisqu’il n’est pas permis d’imposer des règlements pour la «participation» à une page, l’entreprise s’expose à voir sa page supprimée sans préavis – son concours annulé et ses données supprimées.
Clairement, Facebook n’est pas une plateforme de concours et n’offre pas les outils pour en mener un à bien tout en s’assurant qu’il soit juste et qu’il corresponde aux normes strictes -mais sensées- de l’État. D’ailleurs, certaines des règles sur les concours publicitaires de la Loi sur les loteries, les concours publicitaires et les appareils d’amusement s’appliquent à tous les concours tenus au Québec et dont la valeur des prix dépasse 100$ – dont une (5.9) à laquelle le détaillant ne s’est pas conformé.
Alors, on fait quoi? À mon avis, on opte pour une vraie plateforme de concours dont on fait la promotion sur Facebook: on a donc les bons outils d’analyse et de contrôle, on se conforme au règlement de Facebook et on profite d’une belle visibilité.